“Fermer toutes les centrales thermiques et à charbon” : c’était l’une des grandes promesses du quinquennat d’Emmanuel Macron. À l’occasion de la COP 26, qui a débuté le 31 Octobre dernier, les États du G20 se sont à nouveau engagés en faveur de l’arrêt des financements internationaux des centrales à charbon.
Mais pourquoi fait-on autant de bruit autour de ces centrales à charbon ? Si elles sont si polluantes, pourquoi ne les ferme-t-on pas toutes maintenant ? Focus sur une industrie énergétique qui fait débat.

L’industrie énergétique la plus polluante du monde
Si le charbon fut autrefois le symbole de la Révolution industrielle, il fait aujourd’hui grise mine. Et pour cause, des études ont fur et à mesure démontré le bilan catastrophique des centrales à charbon en termes d’écologie. À l’échelle planétaire, on estime même que le charbon représente près de 40% des émissions de CO2. Pourquoi ? Parce qu’il pollue deux fois. Tout d’abord, au moment de son extraction, puis lorsqu’il est consumé dans les centrales.
Elle décroche ainsi la palme d’or de l’énergie la plus polluante, comme le montre ce tableau mettant en lumière les émissions des énergies pour la production d’électricité en équivalent CO2 (CO2e) en gramme par kilowattheure d’énergie finale :
Combustible | Emission de CO2 |
Centrale à nucléaire | 6 gCO2e/kWh (France)* |
Eolien (en mer) | 9 gCO2e/kWh |
Eolien (en terre) | 10 gCO2e/kWh |
Hydroélectrique | 10 gCO2e/kWh |
Biomasse (déchets de bois avec turbine à vapeur) | 32 gCO2e/kWh |
Géothermie | 38 gCO2e/kWh |
Electricité (chauffage) | 210 gCO2e/kWh |
Gaz naturel | 443 gCO2e/kWh |
Pile à combustible | 664 gCO2e/kWh |
Centrale fioul-vapeur | 730 gCO2e/kWh |
Pétrole lourd | 778 gCO2e/kWh |
Centrale à charbon | 1 058 gCO2e/kWh |
Tous les experts se mettent donc d’accord sur un point : il faut à tout prix les supprimer pour enrayer le réchauffement climatique et réduire les émissions de gaz à effet de serre. Une décision nécessaire pour maintenir l’augmentation de la température mondiale sous la barre des 2°, comme l’a prévu l’Accord de Paris.
Le charbon représente toujours 27% de la production d’énergie mondiale
Sur le papier, c’est donc simple : il faut en finir avec les centrales à charbon. Pourtant, la réalité est bien plus complexe. En 2020, le charbon représentait toujours 27% de la production d’énergie mondiale, après le pétrole (31%) et le gaz (25%). Ce chiffre traduit des volontés ambivalentes de la part des pays.
En tête du classement des plus gros producteurs de charbon, on retrouve la Chine qui, en 2020, a produit 3902 millions de tonnes de charbon, soit 50,4% de la production mondiale de cette énergie fossile. Ce mastodonte est suivi de très loin par l’Inde, qui représente 9,8% de la production mondiale.
Fort heureusement, ces mauvais élèves sont supplantés par de plus en plus de pays qui s’engagent en faveur de l’arrêt des centrales à charbon. Ainsi, Bangladesh, le Pakistan, l’Indonésie, les Philippines et le Kenya, ont commencé à renoncer à construire de nouvelles centrales électriques au charbon.
La France, elle aussi, entend fermer toutes ses centrales dans les prochaines années. Il n’en reste plus que cinq encore actives : celle du Havre (Normandie), les deux centrales de Cordemais (Loire-Atlantique), celles de Meyreuil (Bouche-du-Rhône) et de Carling (Moselle). Aujourd’hui, le mix électrique français ne repose plus qu’à 1,4% sur les centrales à charbon, très loin derrière le nucléaire (72,3%) et les énergies renouvelables (19,6%). Un résultat qui sonne le glas du charbon, et ce pour de bon ? Pas vraiment, car la situation est plus complexe.
La fin des centrales à charbon en France ?

Si la France s’est ouvertement engagée depuis plusieurs années en faveur de la fermeture des centrales à charbon, le charbon reste toutefois un objet de paradoxe dans le pays. Pourquoi ? Parce que même si plus aucune centrale n’est construite depuis 1984, l’Hexagone continue d’en importer. En effet, en 2015, la France a importé 13,5 millions de tonnes de charbon depuis les États-Unis, l’Australie, ou encore la Russie. Ces importations ont permis d’alimenter les centrales qui produisent de l’électricité, mais ont aussi été utilisées dans l’industrie.
Dès lors, si l’heure est à la suppression des centrales, qui va s’étaler sur plusieurs années, ce ne sera assurément pas la fin de l’exploitation du charbon en France. L’activité sera en effet maintenue pour sécuriser l’approvisionnement.
Autre paradoxe : si plus aucun fournisseur d’électricité n’aura le droit de faire tourner ses centrales au charbon, ils pourront en revanche le faire à l’étranger. C’est notamment le cas d’EDF, qui a fermé ses centrales en France, mais continue d’exploiter deux des centrales les plus polluantes du monde, qui se trouvent au Royaume-Uni. Deux poids deux mesures.
Il y a donc fort à parier que le charbon a encore de beaux jours devant lui. Reste seulement à croiser les doigts pour que, dans les années à venir, les énergies renouvelables prennent le pas sur l’industrie énergétique la plus polluante du monde. Il en va de l’avenir des futures générations et de la planète.