Les enjeux industriels

L’essentiel

La voiture électrique vient profondément bouleverser le modèle économique de l’industrie automobile. Un transfert de valeur s’opère en effet de la chaîne de traction et du moteur, maîtrisés par les constructeurs automobiles, vers les packs de batteries, dont les compétences sont détenues par les géants de l’électroniques. Par ailleurs, une grande partie de la marge des constructeurs automobile repose sur l’entretien des voitures, qui disparaît presque complètement avec le passage au tout électrique. Des éléments qui expliquent peut être la lenteur des constructeurs à se lancer dans l’électrique…


Transfert de valeur

Dans les véhicules thermiques une part importante de la valeur est concentrée dans la chaîne de traction, le moteur et ses périphériques. Les équipementiers fournissent la grande majorité des autres pièces, train roulant, équipement intérieur, électronique, les constructeurs restant concentrés sur la cellule, le design et bien entendu la motorisation.

L’avènement des véhicules électriques et hybrides bouleverse ce processus. Les packs de batteries chargés de stocker l’énergie, et non plus les moteurs, sont désormais situés au centre de la valeur globale des véhicules. Cela a pour conséquence le transfert de cette valeur vers des équipementiers spécialisés : les fabricants de batteries de nouvelle génération.

La présence des géants de l’électronique grand public comme les japonais Panasonic et Toshiba, les coréens LG et Samsung, les chinois BYD et Thunder Sky, en tant que fournisseurs de batteries pour voitures électriques,  n’est pas une surprise, ils disposent des savoir-faire nécessaires. 

Manque à gagner sur le service après vente

Tous les utilisateurs d’une voiture thermique le savent, après l’euphorie des toutes premières années, dès qu’un véhicule vieillit il faut l’entretenir et continuer à investir.

Les révisons obligatoires pour conserver la garantie, les révisions périodiques, les vidanges, filtres et autres pièces détachées, génèrent une part importante des revenus des constructeurs automobiles. Ces derniers partagent ces revenus avec un réseau de SAV dense et qualifié, de plus en plus technologique, donc de plus en plus cher.

La part de la marge bénéficiaire générée par le SAV dans l’automobile varie d’un constructeur à l’autre, elle se situe dans une fourchette de 15 à 30 % selon les gammes. Cette marge n’est pas entamée pour les véhicules hybrides, au contraire, car ils cumulent les prestations après-vente du thermique et de l’électrique.

Par contre les «tout électriques» représentent une véritable menace pour le secteur du SAV. Leur simplicité, l’extrême fiabilité des moteurs, des batteries sans entretien, posent un problème majeur à la profession automobile : comment récupérer le manque à gagner ?

Cette nouvelle donne est un véritable casse tête pour les stratèges du secteur : accélérer la vente des véhicules électriques va générer une réduction des gains, comment la compenser ? La plupart ont choisi la location des batteries, à des tarifs actuellement prohibitifs pour le particulier, mais de nouveaux entrants, petits constructeurs pour la plupart, ont bien l’intention de redistribuer les cartes d’un secteur en pleine mutation.

Qui travaille avec qui ?

Les constructeurs de véhicules électriques et hybrides, les majors comme les start-up, ont  établi de multiples accords avec les équipementiers fournisseurs de batteries. Certains comme Toyota avec Panasonic, dès la fin des années 90, d’autres en investissant dans des filiales communes avec les groupes d’électronique, c’est le cas de Nissan et NEC pour la création d’Automotive Energy Supply Corp. L’équipementier Bosch a pour sa part choisi une alliance avec le géant coréen Samsung. Ils ont créé ensemble une co-entreprise spécialisée dans les batteries Li-Ion, SB LiMotive. 

Les américains GM et Ford ont naturellement choisi un fournisseur américain, Compact Power Inc, filiale du géant coréen LG. Les petits constructeurs ne sont pas en reste, les norvégiens de Think, pour assurer leur approvisionnement ont ouvert leur capital à un autre producteur des USA : Enerdel.

Cas particulier pour un géant chinois de l’électronique, également producteur de batteries, BYD a choisi de devenir son propre constructeur en faisant l’acquisition d’unités de production automobile.